Bonjour à toutes et tous !

Voici un petit article de blog autour d’un sujet qui remue le monde des doulas aujourd’hui, suite à la réclamation par les femmes qui sont dépositaires du savoir traditionnel autour du « rebozo », de préserver leur savoir. 😊 Face aux dizaines et dizaines de messages reçus sur instagram suite à mes stories sur l’appropriation culturelle autour du rebozo, je me suis dit que j’allais vous faire un petit article ici. (Mon compte insta ICI). Tout d’abord je tiens à remercier les femmes qui m’ont sensibilisé à cette problématique dont notamment Eugénia Corne qui a tellement de belles choses à partager sur ce sujet.

Pour replacer les choses dans leur contexte, voici ce que je partageais en story :

Petite précision ici : la pétition répond aux problématiques de l’usage du rebozo tel qu’il est majoritairement transmis pratiqué aux usa, comme outil pour accompagner la grossesse et l’enfantement. Notre utilisation en Europe est surtout basée sur le soin rituel postnatal, quoi que l’usage durant la grossesse commence à se répandre plus massivement ici aussi. Les usages ne sont pas exactement les mêmes, mais la problématique de fond reste la même.

 

 

Parmi les dizaines de retours positifs, interrogatifs, plutôt négatifs, voici les 3 remarques principales qui m’ont été faites, et les réponses que j’ai commencé à donner individuellement et que je compile ici parce que je ne suis plus en mesure de faire des réponses fournies à chacune à titre individuel (ça prend énormément de temps et j’ai des mamans à accompagner et ma famille qui me demande de laisser de côté mon téléphone😊). Aussi je vous partage ici mes réflexions, qui seront probablement amenées à évoluer, car c’est le but de cheminer ensemble, chacune à notre rythme !

 

«  Oui mais si l’on remet en question l’utilisation du rebozo, alors on ne peut plus rien faire ! Plus de médecine chinoise, plus de pâtes carbonara, plus de massage shantala ! Ce sont pourtant des choses bénéfiques pour tous, pourquoi s’en priver ? Et le partage et la beauté de s’inspirer d’autres cultures ? »

 

Le partage entre les cultures est quelque chose de merveilleux, qui me tient énormément à cœur. Mais partager signifie donner et recevoir. Que donnons-nous au sujet du rebozo ? Pour moi, ce que nous faisons, c’est un peu comme aller à une soirée où chacun doit amener à manger puis venir les mains vides, se servir dans tous les plats, et lorsque quelqu’un pointe le fait que ce que nous faisons n’est pas correct, dire « hey mais c’est une soirée basée sur le partage ! ». Est-ce positif de faire cela ?

Et si en plus celles qui viennent les mains vides sont favorisées par un revenu plus élevé, des conditions de vie plus favorables, une plus grande possibilité de travailler partout où elles le souhaitent, qui viennent les mains vides, face à des personnes qui ont été colonisées, volées, interdites de travailler, et qui elles font l’effort d’amener un plat, mais ne reçoivent rien puisque nous venons les mains vides, alors est-ce du partage ? On voit bien ici que c’est inégalitaire. C’est pourquoi il est important que nous préparions notre propre plat : que nous reconnections à nos racines, pour pouvoir nous aussi partager quelque chose. Recevoir et donner. 😊

 

« Oui mais ces savoirs appartiennent à toutes, le serrage de bassin se retrouve sur d’autres continents, ce geste n’appartient pas seulement à la culture maya, on ne peut pas nous interdire de le pratiquer, ça n’a pas de sens ! »

 

Si ce geste se retrouve dans bien d’autres cultures et appartient au matrimoine féminin, alors il suffit de lui donner un autre nom, et de parler de la diversité de ces cultures, sans vouloir s’inscrire dans une lignée de praticiennes qui n’est pas la nôtre et à laquelle nous ne comprenons quasi rien. C’est un peu comme si quelqu’un vendant une bouteille de vin au prix d’un grand Bordeaux (voire bien plus chère car souvent nous proposons le rebozo à des prix qui n’ont rien à voir avec ce qui se fait traditionnellement) et qu’une fois la bouteille achetée, nous apprenons qu’en fait la personne qui a fait ce « vin »  à réalisé un stage de 3 jours durant lequel elle a appris à presser du raisin, le mettre dans une bouteille et mettre une étiquette sur la bouteille.

Un viticulteur qui connaît son terroir, fait pousser ses propres raisins, a construit sa cave et appris pendant des années auprès de viticulteurs plus expérimentés, qui vend son vin à un prix décent et qui se trouverait face à la personne qui a fait le stage de 3 jours ne devrait-il pas dire « hey mais attendez, ce que vous faîtes ce n’est pas du vin, c’est du jus de raisin pressé ! Vous n’êtes pas viticulteur ! ». Ça serait plutôt normal non ?

Et pourtant, ça ne signifie pas que ce qu’il y a dans la bouteille de jus de raisin n’est pas bon ! Perso j’adore le jus de raisin, et il est plein de bienfaits pour la santé ! Mais ce n’est pas du vin. 😊

 

« Je suis d’accord avec tout ça, mais nous sommes nous-mêmes coupées de nos racines, nous n’avons pas nos propres équivalents en France, dans notre culture, et ça ne me paraît pas juste de priver les femmes françaises de ces savoirs, si cela peut les aider, les soutenir ! Ce serait tellement dommage ! »

 

Je suis d’accord, les femmes de tous les continents MERITENT que l’on prenne soin d’elles de la meilleure manière possible. La bonne nouvelle c’est que nous avons un matrimoine. Il faut juste chercher un peu plus loin que ce qui nous est offert sur un plateau. Nous pouvons nous pencher sur l’histoire des femmes en Europe pré-chrétienne (et même chrétienne), car nous avons aussi des pratiques autour du bassin, elles sont simplement moins mises en lumière que celles qui nous viennent de plus loin. Tout comme nous avons nos traditions de vapeurs vaginales (que l’on appelle yoni steam ce qui là aussi est une appropriation culturelle), de relevailles (les 40 jours après la naissance étaient aussi célébrées en Europe), et de soins du bassin. Il suffit de faire l’effort de chercher un peu plus loin, de renouer avec une culture que l’on nous a transmise sous l’angle du patriarcat, et de faire ce travail de nous la réapproprier en douceur, avec ce qui nous parle le plus. Vous pouvez par exemple découvrir le travail de Odile Tresch et son workshop Ama Zona sur la ceinture européenne traditionnelle !

Nous sommes plusieurs consœurs doulas à souhaiter faire ce travail de reconnecter à notre matrimoine et d’avancer sur ce sujet de la réappropriation culturelle, autour du soin postnatal. Nous pourrons vous tenir informé.es des avancées, de nos découvertes, des pratiques qui émergent de ce travail collégial. 😊

 

 

Enfin je comprends que toute cette discussion soit remuante, que certaines puissent se sentir chamboulées, se sentir pointées du doigt, et que d’autres ne sachent pas quoi penser. Il ne s’agit pas de se juger entre nous, de décider de qui à tort ou raison, de se flageller, du moins selon moi. C’est une invitation à avancer ensemble, chacune depuis l’endroit où nous sommes, dans cette sororité que nous appelons de nos vœux. Comment faire sororité, si nous perpétuons des positionnements qui blessent les femmes dont nous utilisons les savoirs ? C’est tellement triste ! Explorer nos matrimoines respectifs devrait être un droit universel, et il est temps pour nous, je crois, de réclamer ce droit pour nous-mêmes, en tant que femme européenne, inspirée par nos sœurs et consœurs d’autres cultures ! Encore une fois, nous tourner vers nos propres racines, confectionner nos propres rituels, pour pouvoir ensuite partager réellement. D’autres que nous ont déjà emprunté ce chemin et posé des jalons pour nous. A nous de poursuivre ce travail, avec toute la joie et l’espoir que cela éveille en chacune de nous de pouvoir renouer à nos propres cultures, parfois mixtes, mélangées, colorées, pleines d’odeurs et de saveurs ! Encore une fois, il ne nous est pas demandé d’arrêter de prendre soin des femmes, mais de prendre soin des femmes depuis nos propres racines. Et moi je trouve cela merveilleux ! Faisons regermer les graines de ces matrimoines !

Merci à toutes et tous pour votre lecture jusque là, pour vos réflexions et partages, on continue le chemin ensemble !

Plein d’amour !

 

Kristelle

 

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Découvrez les transmissions pour les doulas et accompagnantes du féminin, des évènements en ligne et en présentiel, ICI.

 

 

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